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Bienvenue ! Sur ce blog, Akbou est le centre du monde. C’est un blog plurilingue (français, tamazight, arabe, etc.) culturel, associatif, de communication institutionnelle, d’informations générales, etc. Il est ouvert à tout le monde. Pour poster vos documents et informations ou attirer l’attention du webmaster, usez de cette adresse : tahar.hamadache@gmail.com Militance pro-tamazight et NTIC : mutations des profils de militant(e)s et des problématiques en Algérie. 10 juillet 2019 Militance pro-tamazight et NTIC : mutations des profils de militant(e)s et des problématiques en Algérie. HAMADACHE Tahar [1] Laboratoire LAILEMM – Université de Bejaia thamadachedz@yahoo.fr [Cet article fait partie des Actes du colloque international L’amazighité à lère du numérique , organisé par l’Université d’Eté, 14e session, du1 au 5 juillet 2018, à Agadir. Les actes de ce colloque sont publiés le mois de juillet 2019. Il est repris ici avec l’aimable autorisation, exclusive pour Soummam.unblog.fr , du président de l’Université d’Eté d’Agadir, Dr Lahoucine Bouyaakoubi Anir. ] Introduction Devant l’apparition des NTIC dont les possibilités et les effets restent à étudier, l’évolution des cadres d’organisation de la société civile et, en parallèle, celle progressive des institutions vis-à-vis de la cause amazighe, tendent à éclipser les anciennes formes de mobilisation, à forcer à un recyclage sur le tard des figures connues et à transfigurer l’histoire et les termes de la revendication amazighe. Parmi les conséquences, innombrables et souvent insaisissables de cette situation, l’Internet permet de se faire une idée des nouvelles fonctions, rôles et champs d’intervention par lesquels les anciens militants s’adaptent au nouveau contexte. Ces « autoroutes virtuelles » permettent aussi, dans une certaine mesure, de constater l’apparition de nouveaux acteurs et actrices moins imprégnés des logiques et des tensions antérieures. Et, pour cause, l’apparition de nouvelles sociabilités sujettes à des brassages inédits, de transmission d’expériences souvent tronquées et lestées de témoignages sous-traités donnent lieu à des logiques plurielles. Celles-ci, associées davantage à des horizons personnels qu’à des perspectives mûrement et collectivement débattues et réfléchies, tendant ainsi, du fait de la possibilité de leur médiatisation (surtout) par Internet, à la prolifération d’opinions individuelles faites lignes de conduite. Une telle situation ne manque pas de générer d’innombrables problématiques dont les plus poignantes sont peut-être celle de la collectivisation des opinions porteuses ainsi que celle de la continuité inter-générationnelle qui seules permettent de parler de cause commune, de bilans et d’étapes de lutte, et de réalisations portées par de larges ensembles, historicisables. En s’appuyant sur un ensemble, forcément peu représentatif, de sites Internet d’organisations, d’entreprises acquises à l’amazighité et de profils de nouveaux activistes plus ou moins célèbres, nous nous proposons de mettre à jour quelques profils types de militants évoluant et/ou usant d’Internet, ainsi que quelques lignes problématiques liées à l’évolution de la question amazighe. Généralités Lorsque la brochure «L’Algérie libre vivra : nationalisme, révolutionnisme, démocratie : une boussole – une arme » (Idir El-Watani [2] , 1949) a paru clandestinement au sein du PPA-MTLD, en 1949, ses auteurs furent davantage connus du fait des attaques subies de la part des instances dirigeantes du parti.De la brochure elle-même, Hadjerès écrit que « l’édition originale semi-clandestine il y a cinquante ans fut la cible aussi bien des colonialistes que de certains cercles nationalistes, dans le but de la faire disparaître sans laisser de trace » (2001) et peu d’exemplaires ont en échappé. Il a fallu attendre la fin de la décennie 2000 pour qu’un universitaire en fasse circuler quelque copies numérisées, dont une a été publié sur le blog d’un syndicat de l’éducation, le SATEF [3] , après accord, via Internet, de Dr Hadjerès, l’un des auteurs encore vivants.Celui-ci a mis en ligne ce document, en reproduisant son archive à l’identique, dès que son site [4] est mis en marche. Et c’est dans les années 2010 que de rares écrits del’anarcho-syndicaliste maghrébinSAÏL Mohamed, décédé en 1953, concernant entre autres la culture et l’identité, ont commencé à refaire surface, en usant de larges solidarités internautiques. Si les écrits (recueils de contes kabyles traduits et commentés en français, nouvelles en français, roman en tamazight de Kabylie), ronéotypés dans les années 1960 ou manuscrits, de BelaidNath-Ali ont été mieux sauvegardés, c’est à la faveur des nouvelles maisons d’édition privées s’occupant du livre amazigh lancées à Tizi-Ouzou et à Béjaïa que son œuvre ainsi que son parcourscommencent à être mieux connues, par des colloques et des publications sur le web. L’œuvre de Taos Amrouche qui, dès 1936, s’est consacrée à la défense et à la promotion du patrimoine oral amazigh au niveau mondial, est pour ainsi dire mieux connue.Maisc’est encore depuis Internet que nous connaissons un peu mieux son parcours d’intellectuelle engagée. D’autres initiatives de groupes, et d’autres auteurs, qui ont marqué leur temps, semblent encore échapper au partage numérique. C’est par exemple le cas des travaux de Haroun Mohamed dont quelques polycopiés de vulgarisation du système linguistique amazigh et quelques poèmes commencent à circuler, encore timidement, en ce premier semestre 2018 autour de l’hommage qui lui a été rendu dans la ville d’Akbou. C’est le cas aussi des revues ronéotypées à l’époque de la clandestinité telles qu’ITIJ, éditée par le groupe du même Haroun au cours des années 1970, ou de TAFSUT, éditée par les universitaires du MCB [5] dans les années 1980. A ces époques, coloniale et panarabiste, la diffusion aussi bien que l’abonnement est une affaire à la fois très sérieuse et très risquée. On choisit de travailler dans l’ombre tel que Belaid Ath-Ali, dans l’anonymat total tels que les auteurs de ITIJ ou (souvent) de TAFSUT, ou de s’exposer en acceptant la marginalisation tel que Saïl et Amrouche, l’exclusion et la fuite tel que les auteurs de IDIR EL WATANI, la pression permanente tel que Mammeri, l’exil tels que les animateurs de l’Académie berbère de Paris dont Amrouche, etc. Les mésaventures des abonnés ne sont connus que rarement, et souvent incidemment : parmi les prisonniers des manifestations du MCB de 1981, de deux détenus issus de mon village, l’un était militant du MCB et l’autre avait seulement sur lui une ceinture écrite en tifinagh : c’était un abonné à la littérature du MCB ou, comme on dirait aujourd’hui, « read-only-netter ». Dans les années 80, on peut néanmoins parler de « tournant populaire » : il n’était plus nécessaire d’écouter clandestinement, l’oreille collée au transistor, les émissions de Radio-Tanger ou le grésillement du tourne-disque par lesquels on découvrait, enfant initié par un père civil mais ancien artificier discret de l’Armée de libération nationale, les chansons contestataires de Slimane Azem, Ait-Meslayene, Taleb Rabah, etc. En prenant de l’ampleur, la revendication amazighe a gagné en sécurisation mais aussi en niveaux d’intervention qui se sont vus multiplier : production intellectuelle (documents d’Yakouren, revue Tafsut), mobilisation populaire (galas, meetings, manifestations), collectifs estudiantins et de travailleurs, société civile (ONG de droits de l’homme), tribunes artistiques et médiatiques, etc. Avec la libération de Mohamed Haroun,en 1987, et l’ouverture pluraliste ayant suivi les événements d’octobre 1988, cette dynamique est allée s’étoffant et se spécialisant. Des partis politiques agréés demandent la reconnaissance en tant que langue officielle (FFS [6] , PT [7] , PST [8] ) ou au moins nationale (RCD [9] ) de tamazight ; le MCB, fort du rapport de synthèse de son séminaire de juillet 1989, s’est déclaré transpartisan, assis sur une base as